Les Mottes Castrales de l'an mil
de Saint Dizier La Tour
Directeur des fouilles Philippe RACINET, assisté de Richard JONVEL
Professeur d'Histoire et d'archéologie médiévales, enseignant-chercheur de l'université Jules Verne de Picardie et directeur des campagnes, directeur du laboratoire d'archéologie et d'histoire de l'université de Picardie et responsable des fouilles de 2014, 2015 et 2016 sur le site de La Tour Saint Austrille
Archéologue médiéviste au Service Archéologie Préventive d'Amiens Métropole. Responsable scientifique des fouilles programmées de Boves (Somme, 80) et Murat (Creuse, 23).
Le complexe castral de La Tour-Saint-Austrille est l’objet d’un programme d’archéologie de terrain depuis 2014. Il s’étend sur une superficie d’environ 4 ha et se compose de trois tertres : au sud, une motte principale dominant l’ensemble ; au nord, deux petites buttes mitoyennes, distantes de 4,50 m et séparées par un cours d’eau, la Goze ; au centre, une vaste plateforme surélevée qu’occupa une église fondée au xe s. et une nécropole, siège d’une collégiale puis d’un prieuré (1095) dépendant de l’abbaye bénédictine de Déols.
Le tertre principal est implanté sur la rive gauche de la Goze, sur une terrasse constituée de sable granitique induré. Entamé par une carrière et par deux opérations de fouille archéologique au xixe s., le tertre initial, ovalaire, mesure 50 m (NS) sur 44 m (OE) pour une hauteur de 13 m. La plateforme, estimée à 220 m2, se limite aujourd’hui à une simple crête. Cette motte était ceinte d’un fossé qui circonscrit un espace beaucoup plus important.
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Le relevé topographique révèle ainsi l’existence d’une grande enceinte fossoyée de forme trapézoïdale établie sur la rive gauche de la Goze, englobant 2 ha environ. Elle comporte la grande motte avec, au nord, une « basse cour » dont la pointe orientale est occupée par l’établissement religieux fondé au xe s. et par des masures.
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Le grand tertre s’étend au-dessus d’un socle rocheux taillé par l’homme. La phase de vitrification nécessite, en effet, la disposition au sol d’un épais tapis de végétaux sur lesquels sont disposées des roches granitiques maintenues par un coffrage mixte comportant des poutres et des pierres. Deux niveaux de terres noires, séparés par un radier damé, pourraient correspondre à une succession d’occupations qui s’achève sur une résidence fortifiée dont les fondations sont maçonnées.
Philippe Racinet et Richard Jonvel, « Saint-Dizier-la-Tour (Creuse).
Mottes castrales de La Tour-Saint-Austrille », Archéologie médiévale, 47 | 2017, 250-251.
Les deux petits tertres septentrionaux participent au fonctionnement de l’ensemble précédent, la petitesse de leurs plateformes sommitales ne pouvant correspondre à une occupation élitaire. La motte nord a une base circulaire d’un diamètre de 36 m et une hauteur de 7 m. La plateforme sommitale, de forme rectangulaire, mesure 12,60 × 10 m, soit une superficie de 126 m2. La motte sud, de forme ovale (39 m × 31 m), présente des pentes asymétriques, les plus raides donnant sur la rivière. Sa plateforme sommitale s’élève aussi à 7 m et sa surface initiale mesure 10,20 × 7 m, soit 71,4 m2. Le fossé ceinturant les deux buttes a été entièrement comblé, à l’exception d’une légère plateforme au NE qui atteste une contrescarpe surélevée. Avec cet ensemble, on dispose d’une fortification de terre comprise dans une enceinte ovalaire mesurant environ 138 m de long sur 112 m de large (1,50 ha), au centre de laquelle évoluent deux petites mottes séparées de quelques mètres. Cette situation, rarissime, complète de manière originale le premier ensemble situé au sud. Dans l’hypothèse d’une zone environnante non marécageuse, il pourrait s’agir d’un système d’entrée, avec une possible fonction complémentaire en liaison avec la métallurgie.
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La répartition fonctionnelle est différente selon qu’on se réfère aux inventaires du xixe s. ou à la collection actuelle. Avec les premiers, le domaine militaire comptabilise entre 50 et 62 % des isolats pour la grande motte alors que la petite motte sud se caractérise par une forte proportion d’éléments de quincaillerie (59 à 38 %). La collection actuelle comporte en majorité de l’outillage (41 %), l’armement et les éléments de quincaillerie totalisant respectivement 13 et 19 %.
Philippe Racinet et Richard Jonvel, « Saint-Dizier-la-Tour (Creuse).
Mottes castrales de La Tour-Saint-Austrille », Archéologie médiévale, 47 | 2017, 250-251.
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